Méli-mélo > Les Plantes et les jardins en littérature > Eté en Algérie
Article publié le 11 janvier 2010 et visité 2907 fois. | |
Albert Camus, dont nous commémorons le cinquantenaire de la mort, a écrit sur son Algérie natale de beaux textes où il exprime son bonheur physique d’être au monde : "Nous arrivons par le village qui s’ouvre déjà sur la baie. Nous entrons dans un monde jaune et bleu où nous accueille le soupir odorant et âcre de la terre d’été en Algérie. Partout, des bougainvillées rosat dépassent les murs des villas ; dans les jardins, des hibiscus au rouge encore pâle, une profusion de roses thé épaisses comme de la crème et de délicates bordures de longs iris bleus. Toutes les pierres sont chaudes (...). A gauche du port, un escalier de pierres sèches mène aux ruines, parmi les lentisques et les genêts. Le chemin passe devant un petit phare pour plonger ensuite en pleine campagne. Déjà, au pied de ce phare, de grosses plantes grasses aux fleurs violettes, jaunes et rouges, descendent vers les premiers rochers que la mer suce avec un bruit de baisers (...). Au bout de quelques pas, les absinthes nous prennent à la gorge. Leur laine grise couvre les ruines à perte de vue. Leur essence fermente sous la chaleur, et de la terre au soleil monte sur toute l’étendue du monde un alcool généreux qui fait vaciller le ciel (...). Entre les dalles du forum, l’héliotrope pousse sa tête ronde et blanche, et les géraniums rouges versent leur sang sur ce qui fut maisons, temples et places publiques (...). Enfoncé parmi les odeurs sauvages et les concerts d’insectes somnolents, j’ouvre les yeux et mon coeur à la grandeur insoutenable de ce ciel gorgé de chaleur." Albert CAMUS (1913 - 1960), dans Noces, 1936, extraits de Noces à Tipasa. |
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